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comme une violette ; les horizons nets, lilas ou incandescents : tout cela est permanent. À la longue, l’homme se met en équilibre, sa machine musculaire se durcit ; il devient plus résistant, plus habitué aux extrêmes ; partant, il peut prendre le goût de contrastes plus tranchés. — En même temps il est plus excitable, la détente en lui est plus prompte et plus âpre, l’accent plus bref, plus sonore, plus voisin du cor et du hautbois. — Enfin il devient plus extérieur, moins reployé, plus épanché vers le dehors, vers les formes, les sons, le luxe, les choses voyantes, les félicités sensibles et palpables. — Mettez le même homme dans un bain continu d’air moite, tempéré, paisible : vous allez l’atténuer, l’affiner, l’adoucir.

Toutes les variations du climat, du sol, des dehors, ont leur contre-coup proportionné dans le moral. Pour expliquer ce fait, il y a deux principes : la loi de sélection de Darwin : ceux-là seuls subsistent à la longue, se reproduisent et réussissent, qui sont le mieux accommodés au pays ; — un Flamand au Maroc mourra plus aisément, sera plus triste, trouvera moins