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sortes de troncs de palmiers dont la tête s’épanouit en un bouquet de nervures. Sur cet appui si frêle porte toute la voûte. La dernière colonne lance sa gerbe de vingt-trois arceaux de façon à porter tout le chevet. Si hautes, si droites, si blanches avec cette gerbe couronnante d’arceaux noirâtres qui vont se perdant dans la blancheur des murs, ces colonnes semblent l’illumination d’un feu d’artifice ou le jaillissement continu d’un jet d’eau. On ne peut rien imaginer de plus élégant que leurs courbes ou de plus riche que leurs faisceaux. Quand on aura enlevé le plancher qui coupe la salle au premier étage, on aura probablement le plus beau vaisseau gothique de France, surtout si l’on débouche les fenêtres et si l’on refait les vitraux. Les colonnes étant minces font des deux nefs une seule nef, par l’abondance des jours. L’immensité des fenêtres, le ruissellement damasquiné des ors et de la pourpre des vitraux répandront une sorte de gloire dans ce superbe vide. Il flamboiera comme un tabernacle, comme flamboie déjà la Sainte-Chapelle de saint Louis si parée, si rayonnante, si semblable à une