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millions dans le sable blanc de la plage. — Des femmes aux pieds blancs, un râteau à la main, ramassent les algues sèches ; le vent, avec la salure de la mer, leur arrive au visage, apportant une roulante harmonie de bruissements et une poussière d’écume.

De l’autre côté de l’isthme, la mer est unie par places comme un miroir de saphir ; ailleurs, imperceptiblement rayée de frissonnements qui s’entre-croisent ; un petit flux arrive sur le sable poli, puis s’écoule avec un bruit faible. L’eau est si transparente, qu’on voit au fond les coquilles, les crabes qui s’enfouissent, les pointes de granit qui affleurent. Des herbes à têtes fleuries descendent le long des cassures du roc jusqu’au-dessus de son azur. — Un petit navire vacille en face ; quelques barques à voiles courent à l’horizon. Mais ce que les yeux ne se lassent pas de voir, c’est ce puissant et solide azur qui tranche par une ligne si nette et un contraste si fort sur le vert terne de la lande et sur le gris blanchâtre de la côte. Seul il renvoie la lumière ; tous les autres objets l’éteignent. La côte, rayée de murs blancs, couturée de pierres