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doux et tendre, tout matinal et virginal ; on ne voit pas de vapeurs, il y en a pourtant, mais leur mousseline est si finement diaphane qu’elles ne marquent leur présence qu’en confondant la mer et le ciel à l’horizon. Le soleil qui monte fait un lac d’or ruisselant et tremblotant sur la soie azurée de l’eau immobile. Tout est azur, azur tendre, l’immense mer, le grand ciel ouvert ; de petites barques lointaines, grisâtres, y remuent imperceptiblement comme des mouettes.

On descend par une longue ruelle tortueuse où les entassements de pierres rougeâtres et brunes sont encore roussis par le soleil ; c’est un calvaire, les stations sont marquées. — Cette aridité n’a rien de repoussant, les longues lignes des murailles découpent des pans de ciel riant. On se sent peintre dans ce pays. — Au tournant apparaissent les lointains du côté de la terre, longues et hautes collines onduleuses et vaporeuses, veloutées par la distance, sèches, mais cependant si belles ! Ces grandes formes baignées d’air et de lumière s’allongent si paisiblement et si noblement ! À leur pied, l’étang de Thau, petite mer laissée par la mer, luit comme une