ple, tantôt avec le patriciat, mais toujours féroces, acharnés, implacables, cependant que la peste noire fauche ce peu que les fureurs civiles avaient épargné d’hommes, de femmes et d’enfants, c’est alors que, dans la ville batailleuse des Salembiene et des Tolomeî, apparaît l’une des plus suaves, l’une des plus grandes figures que les pacifistes aient le devoir d’inscrire dans leur Panthéon.
Comme sa patronne, la martyre d’Alexandrie, au matin de son adolescence, Catherine de Sienne fut choisie entre toutes, devint l’épouse de Jésus. Dans une extase d’amour, parmi les lys de flamme et les astres épanouis, le divin fiancé met au doigt de la vierge défaillante, une bague, un anneau, gage mystérieux, non d’un métal obscur tel que l’or ou l’argent, mais de lumière céleste qui, pour elle seule et dans la nuit, resplendissait. Les stigmates imprimés ne furent pas, comme ceux de Francesco, les trous sanglants et douloureux, les empreintes du Calvaire, mais bien des taches de clarté, les rayons d’un feu immatériel pénétrant la chair comme un rais de soleil pénètre le cristal, sans le briser ni le brûler. Ainsi, vivant sur le cœur même du Dieu qu’elle adorait, et comme transverbérée d’une flamme inextinguible, Catherine habita, dès ce monde, les hauteurs du Paradis. Sa parole enfantait des miracles, chassait les démons, apaisait les discordes, pacifiait les ennemis, apportait la douceur aux partis furieux.
Cette visionnaire qui percevait l’odeur même de l’Amant céleste, discourait avec lui, marchait à ses côtés, le recevait dans sa chambre, vivait dans une hallucination paradisiaque, cette visionnaire apportait dans les affaires du siècle, dans les négociations diplomatiques, dans les ambassades, une clairvoyance, une perspicacité, un sang-froid dignes des plus grands politiques, de César Borgia ou de Machiavel. Mais son domaine étant hors du monde, c’est vers l’apaisement que tendaient ses efforts. Ses lettres d’affaires surprennent par le naturel, par la simplicité. On les dirait écrites de nos jours. Si les hagiographes racontent qu’un ange lui dévoila, dans sa première ambassade à Rocca d’Orcia, chez Odoardo Salembiene, les secrets du parchemin et l’art de conduire une plume, les documents qui viennent d’elle offrent à l’historien des gestes et des mœurs une longue suite