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sacré : un char couvert d’un voile y est dédié à la déesse ; le pontife seul a le droit d’y toucher. Il sait quand la déesse est présente au sanctuaire ; elle en sort traînée par des génisses ; le pontife la suit dans un profond recueillement. Partout alors ce sont des jours de réjouissances ; les fêtes règnent aux lieux que la divinité honore de sa présence et de son séjour. On n’entreprend point de guerres, on quitte les armes, tout fer est caché ; alors seulement on connaît, alors seulement on chérit la paix et le repos, jusqu’au moment où le pontife ramène dans le temple la déesse, fatiguée de sa résidence chez les mortels. Ensuite le char et le voile, et, si vous voulez le croire, la déesse elle-même, sont baignés dans un lac écarté. Des esclaves sont employés à cet office, et aussitôt après le même lac les engloutit. De là cette terreur secrète et cette ignorance religieuse sur des mystères qu’on ne peut pénétrer qu’en y trouvant la mort.

XLI. Cette partie de la Suévie s’étend aux contrées les plus reculées de la Germanie. Maintenant, ainsi que précédemment j’ai suivi le cours du Rhin, je vais suivre celui du Danube. Près de notre frontière, on rencontre les Hermondures, fidèles alliés des Romains ; aussi, non-seulement, comme les autres Germains, ils commercent avec nous sur la rive, mais ils peuvent librement, et sans gardes, pénétrer dans l’intérieur, jusqu’à la colonie la plus florissante de la Rhétie. Nous ne montrons aux autres nations que nos armes et nos camps ; mais nous ouvrons à ces peuples nos maisons de ville et de campagne, et ils n’y portent aucune envie. Chez les Hermondures, prend sa source l’Elbe, fleuve célèbre et jadis connu de nos soldats : aujourd’hui on en entend seulement parler.