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dans les arts libéraux, et disait préférer le génie naturel des Bretons à l’esprit cultivé des Gaulois. Ainsi ceux qui auparavant dédaignaient la langue latine, ambitionnèrent de la parler avec éloquence : de là aussi fut mis en honneur notre habillement, et la toge devint en usage. Peu à peu survinrent les recherches de nos vices, les portiques et les bains, et l’élégance des festins : ce que dans leur imprévoyance ils appelaient civilisation, c’était une partie de leur servitude.

XXII. La troisième année de l’expédition découvrit des peuples nouveaux : toutes ces nations furent ravagées jusqu’à l’embouchure du Taüs. Les ennemis en furent frappés d’une telle terreur, qu’ils n’osèrent pas harceler notre armée, quoiqu’elle fût harassée par des temps affreux ; et l’on eut même le loisir d’établir des forts. Les habiles remarquaient que nul autre général n’avait choisi plus savamment les avantages des positions ; qu’aucun poste placé par Agricola n’avait été enlevé de force par les ennemis, ou abandonné par capitulation ou par désertion. Les sorties étaient fréquentes ; car des approvisionnemens pour l’année soutenaient contre les longueurs des sièges. Ainsi l’hiver s’y passait avec sécurité, et chaque garnison s’y suffisait à elle-même. Les ennemis attaquaient vainement, et se désespéraient, parce que, accoutumés le plus souvent à compenser les pertes de l’été par les succès de l’hiver, alors ils étaient également repoussés et l’hiver et l’été. Et jamais Agricola ne s’attribuait, par ambition, les exploits d’autrui. Centurion, préfet, avaient en lui le témoin le plus sincère de ses actions. Quelques-uns le disaient trop acerbe dans ses reproches : affable aux bons, il était sévère pour les méchants : d’ailleurs, rien ne restait de sa colère : vous