Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/215

Cette page n’a pas encore été corrigée

de pluies et de brouillards ; le froid n’y est pas rigoureux. Les jours ont plus de durée que ceux de notre monde ; les nuits sont claires, et si courtes, à l’extrémité de la Bretagne, qu’entre la fin et le lever du jour il n’y a qu’un faible intervalle. On affirme même que, si les nuages ne s’y opposent pas, on voit durant la nuit la clarté du soleil, et qu’il ne se couche ni ne se lève, mais ne fait que passer à l’horizon. Sans doute que les extrémités planes de la terre, ne formant qu’une ombre très basse, ne peuvent élever les ténèbres de la nuit, qui tombe sans atteindre le firmament et les astres. Le sol, à l’exception des plantes accoutumées à croître en des climats plus chauds, de l’olivier et de la vigne, les admet toutes, et même avec abondance ; la maturité est tardive, la végétation rapide, et cela par une seule et même cause, la grande humidité de l’air et du terrain. La Bretagne renferme de l’or, de l’argent, et d’autres métaux, prix de sa conquête. L’océan y produit aussi des perles, mais ternes et livides : on a pensé qu’il fallait en accuser l’inhabileté des pêcheurs ; car, dans la mer Rouge, on arrache des rochers les coquilles mères vivantes et respirant encore, tandis qu’en Bretagne on les ramasse à mesure qu’elles sont amenées par les flots ; moi, je croirais que ces perles manquent de qualité plutôt que nous d’avarice.

XIII. Les Bretons se soumettent aux tributs, aux levées, aux autres charges qu’impose l’empire, avec bonne volonté, si l’on n’y joint pas l’injustice, qu’ils tolèrent impatiemment, assez domptés pour obéir, pas encore assez pour être esclaves. Jules César étant donc entré le premier des Romains en Bretagne avec une armée, quoique par un combat heureux il eût épouvanté les ha-