des Quades. Par le langage et la coiffure, les Marsignes et les Buriens annoncent des Suèves. Les Gothins parlent gaulois, et les Oses pannonien ; c’est dire assez qu’ils ne sont pas Germains : ajoutons qu’ils se soumettent à des tributs ; une partie leur est imposée par les Sarmates, l’autre partie par les Quades, qui les traitent comme étrangers. Les Gothins, pour surcroît de honte, tirent le fer des mines. Tous ces peuples s’étendent peu dans la plaine ; ils habitent en général dans des gorges, sur le sommet et le penchant des montagnes. Car une longue chaîne[1] partage et coupe en deux la Suévie. Au delà de cette chaîne sont un grand nombre de nations, dont la plus considérable est celle des Lygiens[2], divisée elle-même en beaucoup de cités. Il suffira de nommer les plus puissantes, les Aries, les Helvécones, les Manimes, les Élysiens, les Naharvales. Chez les Naharvales on montre un bois consacré dés longtemps par la religion. Le soin du culte est remis à un prêtre en habit de femme. Ce culte s’adresse à des dieux qui, dans l’Olympe romain, sont, dit-on, Castor et Pollux ; ils en possèdent les attributs : leur nom est Alci. Du reste, point de statue, nulle trace d’une origine étrangère ; mais ce sont bien deux frères, tous deus jeunes, qu’on adore. Les Aries surpassent en forces les peuples que j’ai nommés avec eux. Ces hommes farouches, pour enchérir encore sur leur sauvage nature, empruntent le secours de l’art et du temps : ils noircissent leurs boucliers, se teignent la peau, choisissent pour combattre la nuit la plus obscure. L’horreur seule, et l’ombre qui enveloppe cette lugubre armée, répandent l’épouvante : il n’est pas d’ennemi qui soutienne cet aspect nouveau et pour ainsi dire infernal ; car dans tout combat les yeux sont les premiers vaincus. Au delà des Lygiens, habitent les Gothons[3], soumis à des rois dont la main se fait déjà plus sentir que chez les autres nations germaniques, sans que la liberté cependant soit encore opprimée. Plus loin, au bord de l’Océan, sont les Rugiens et les Lémoves. Toutes ces nations ont pour signe
- ↑ La chaîne dont parle Tacite comprenait sans doute les escarpements de ce long plateau qui se détache des Karpathes, sépare le bassin de l’Oder et la Silésie du bassin de la Morava ou de la Moravie, et atteint l’extrémité orientale de la Bohême, où il se divise pour former une enceinte de montagnes autour de ce pays.
- ↑ Sur la Vistule.
- ↑ Prés de la Vistule, au sud des Estyens et des Vénèdes.