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qu’il fit à la ville pour relever ses ruines ; les Lyonnais nous avaient eux-mêmes offert cette somme dans des temps malheureux.

3. La colonie de Lugdunum (Lyon) fut fondée par Munatius Plancus, l’an de Rome 711, sur la hauteur de Fourvière, qui n’est aujourd’hui que la moindre partie de cette grande cité. Cent ans après, l’an 811, elle fut entièrement détruite par un incendie, qui fait le sujet de la Lettre XCIe de Sénèque. Il s’était donc écoulé sept ans entre le désastre de cette ville et le moment où Néron vint à son secours. — Quatre millions de sesterces équivalent à 735 239 fr. 20 c.

An 66

Délation

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C. Suétonius et L. Télésinus étant consuls, Antistius Sosianus, exilé, comme je l’ai dit, pour avoir fait contre Néron des vers satiriques, fut tenté par les récompenses prodiguées aux délateurs et la facilité du prince à répandre le sang. Il y avait dans le même lieu un autre exilé, Pammène, fameux dans l’art des Chaldéens, et, à ce titre, engagé dans une infinité de liaisons. Sosianus, esprit remuant, et que l’occasion trouvait toujours prêt, tira parti de la conformité de leur sort pour gagner sa confiance. Persuadé que ce n’était pas sans quelque motif qu’à chaque instant Pammène recevait des messages, donnait des consultations, il apprit en outre que P. Antéius lui faisait une pension annuelle. Or, il n’ignorait pas qu’Antéius était haï de Néron comme ami d’Agrippine, que son opulence était faite pour éveiller la cupidité, et qu’une cause pareille était fatale à beaucoup d’autres. Il intercepta donc une lettre d’Antéius, et déroba des papiers secrets où Pamméne avait tracé l’horoscope de cet homme ; il trouva aussi les calculs de l’astrologue sur la naissance et la vie d’Ostorius Scapula. Aussitôt il écrit à Néron "que, s’il veut suspendre un moment son exil, il lui révélera des secrets importants, où la sûreté de sa personne est intéressée ; qu’Antéius et Ostorius ont des vues sur l’empire ; qu’ils s’enquièrent de leurs destinées et de celles du prince." Des galères sont envoyées, et Sosianus amené en toute hâte. Sa délation fut à peine connue que déjà on voyait dans Antéius et Ostorius moins des accusés que des condamnés. Personne n’aurait même scellé le testament d’Antéius, si Tigellin n’eut autorisé cette hardiesse : il l’avait averti auparavant de ne pas différer ses dernières dispositions. Antéius prit du poison ; puis, fatigué d’en attendre l’effet, il hâta son trépas en se coupant les veines.

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Ostorius était alors dans une terre éloignée, sur la frontière