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DE SIAM. Livre V.

rance juſqu’au lendemain, quand il fallut ſe ſéparer de nos Peres, je ſentis que j’avois une extrême peine à les quitter. Le Pere Supérieur & deux autres voulurent venir avec moy, & accompagner Monſieur l’Ambaſſadeur juſqu’à son Vaiſſeau.

Nos conducteurs ramérent toute la nuit, & le quatorzième Décembre nous nous rendîmes vers les ſept heures du matin à l’Hôtel de Monſieur l’Ambaſſadeur à Siam. On étoit occupé à embarquer les Porcelaines & les autres meubles de ſon Palais, dont le Roy luy avoit fait préſent. Avant que de partir de la Ville, j’eus un long entretien avec le Pere Suarez & le Pere Fuciti. Ces Peres ont appris à ſouffrir ſans ſe plaindre & ils ont ſur ce point une délicateſſe de conſcience, qui leur fait garder des meſures, dont la morale la plus ſévère ne s’accommode pas toûjours. Ils me témoignérent ſeulement qu’ils avoient été ſurpris, qu’on accuſât les Jéſuites qui ſont dans les Indes, de prendre de l’argent à la façon des Paroiſſes, pour adminiſtrer le Baptême, dire la Meſſe, &c. vû qu’une infinité de peuples pouvoit rendre témoignage du contraire, & ils me proteſtérent devant Dieu qu’on n’avoit jamais rien fait qui pût altérer le moins du monde la régle de nos Conſtitutions. Je cher-

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