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DE SIAM. Livre V.

on n’eùt pas de peine à l’en faire convenir. Il n’étoit point du ſentiment des Talapoins Siamois qui s’imaginent & qui enſeignent que quand la Lune s’éclipſe, un Dragon la dévore & qu’il la rejette ensuite. Quand on leur objecte d’où vient que nous ſçavons & que nous prédiſons même le moment de l’Eclipſe, de quelle grandeur elle ſera, combien elle doit durer, d’où vient que tantôt il n’y a qu’une partie de la Lune éclipſée, & qu’elle l’eſt quelquefois toute entiere : ils répondent froidement que ce Dragon a ses repas réglez, que nous en ſçavons l’heure, & que nous connoiſſons la mesure de ſon appetit, qui eſt quelquefois plus grand & quelquefois plus petit. On a beau leur prouver que tout cela eſt chimérique, ils perſiſtent opiniâtrément dans leur illuſion. Pour finir cette matiere, j’ajoûte icy la Lettre que le Seigneur Conſtance a écrite au Pere de la Chaize, dans laquelle ce Miniſtre a bien voulu luy rendre compte de ce qui ſe passa dans la derniere Audiance que le Roy nous donna à l’occaſion de l’Eclipſe, elle a eſté traduite du Portugais,