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VOYAGE

Le vent étant contraire, on recommence à faire des priéres.

Nous continuâmes donc cette route, & nous allâmes au Nord-eſt, dans l’eſpérance d’un vent plus favorable. Mais comme aprés avoir navigué long-tems, le vent ne changeoit point, on voua une autre neufvaine qu’on commença avec un renouvellement de dévotion & de ferveur. Plus de la moitié de l’Equipage étoit dangereusement malade, & l’autre partie étoit ſi foible qu’ils ne pouvoient fournir à faire la manœuvre.

Les Matelots de ſaint Malo ſe diſtinguent par leur dévotion.

Les Matelots qui étoient de Saint Malo voulurent donner des marques de leur dévotion envers Saint Sauveur leur Patron. Ils députérent vers un de nos Péres deux ou trois d’entre eux, pour le prier de les aſſiſter dans leurs bons deſirs, & de leur preſcrire ce qu’il falloit faire pour rendre leur vœu agréable à leur ſaint Patron. Ils ont cette coûtume parmy eux, qu’ils obſervent inviolablement, lorsqu’ils ſe trouvent dans quelque péril ſur Mer, de promettre à Saint Sauveur d’aller viſiter son Egliſe en linge, c’eſt-à-dire, en chemiſe, d’y communier, & d’y faire chanter une Meſſe ſolemnellement. Ils avoient déja concerté entre eux de faire ce vœu : pluſieurs des leurs, qui étoient malades du ſcorbut, leur avoient inſpiré cette penſée, & les preſſoicnt de l’éxécuter. Aprés qu’ils