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Au mois de septembre 1882, M. Sulte publiait dans le journal le Canada, une correspondance, trop longue pour être reproduite ici en entier, mais que, cependant, il ne faut pas vouer toute entière à l’oubli ; c’était précisément une réponse, en masse, aux personnes charitables qui avaient voulu lui offrir quelques bons conseils, lui signaler les erreurs et les dangers de ses voies.

Cette correspondance, par manière d’exemple des dangers auxquels on est exposé et auxquels on succombe, peut servir de cave canem, à tous ceux qui veulent pénétrer dans le domaine de la littérature :

« L’hiver dernier, dit M. Sulte, au cours d’histoire du Canada à l’Institut, je me faisais adresser des billets, auxquels je répondais, séance tenante, avec un bonheur remarquable. Ce petit truc animait la scène. Aujourd’hui, en le révélant au public, je le brûle, comme disent les agents de police. »

« Depuis le printemps, les livraisons de l’Histoire des Canadiens-Français défilent devant les souscripteurs, et voilà bien que les petits papiers reparaissent ! Cette fois, ce n’est pas moi qui les invite, soyez-en persuadés. »

Avant d’aller plus loin, arrêtons-nous un instant à contempler ce truc, dont M. Sulte est si fier. Au fait, c’est qu’il est superbe ! C’est d’une dignité et d’un respect pour le public que n’a jamais surpassés Robert Macaire. La pépite de plomb doré que Barnum avait attachée par une énorme chaîne au plancher de son muséum, n’atteint pas les proportions d’une muscade de bois, comparée à ces billets de M. Sulte.

En brûlant son truc (comme on dit à la police), M. Sulte a bien un peu grillé ses admirateurs ; mais que voulez-vous ? Quand on tient tant de ficelles, il faut bien qu’il en échappe. Un de ces admirateurs quand même a eu l’air, il n’y a pas bien longtemps encore, de vouloir représenter les travaux de M. Sulte, comme une résurrection ; une résurrection historique, sans doute. C’eut été très exagéré et fort naïf, avant la correspondance de septembre ; mais depuis que M. Sulte a tourné le dos à son auditoire, on n’est vraiment pas excusable de ne pas voir et de ne pas sentir que ce n’est pas une résurrection historique, mais une exhibition scénique que M. Sulte sert au public.

M. Sulte continue, dans sa correspondance :

« Il y en a de trois sortes (les petits papiers) : ceux qui publient les gazettes, ceux qui me sont envoyés privément et ceux qui circulent dans l’intention de les placer sous mes yeux. Pris en bloc, ces billets, plus ou moins tendres, constituent le critique de mon ouvrage.

« Eh bien ! elle est pauvre la critique. Sur plus de trente attaques, il n’y en a pas une qui sorte de la plume d’un homme instruit.

« Je vais répondre, cependant, quelques mots à ces remarques désa-