Page:Taché - Les asiles d'aliénés de la province de Québec et leurs détracteurs, 1885.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

d’un livre intitulé "Chapters in the History of the insane in the British Isles," 1882. M. le Dr. Daniel Hack Tuke n’est pas le premier venu et ses écrits ne sont pas, d’ordinaire, sans valeur : il est connu en Angleterre et son nom est inscrit dans les catalogues ; mais le fait qu’il ne se trouve pas mentionné dans un livre qui passe pour contenir la biographie abrégée des célébrités britanniques — "Men of the time", bien que n’étant nullement une preuve d’insignifiance irait, cependant, à faire croire que ce monsieur n’est pas à tel point fameux que d’offrir une exception au proverbe — Nul n’est prophète en son pays —. Quoiqu’il en soit, il est évident qu’il a voulu se donner, en Canada, les allures d’un Prophet abroad. Attendu que ceux, dont M. le docteur Tuke a voulu caresser les haines, l’ont représenté comme un oracle, ils ne devront, ni lui, ni eux, s’étonner que ceux qu’il a froissés cherchent à connaître à qui ils ont affaire.

M. le Dr Tuke est un homme ordinaire ; son talent est celui du compilateur ; il lui arrive parfois de dire, de lui-même, de bonnes choses ; mais, en général, du moment qu’il lâche la remorque, il navigue à l’aventure et se heurte aux lieux communs et aux platitudes. Comme aliéniste, il a pris une ornière et il la suit. Il réussit quelquefois dans l’analyse, mais quand il essaye de la synthèse, oh ! alors il devient tout à fait amusant. C’est ainsi que, dans ses Chapters, la pièce de résistance de ses œuvres, voulant, à la page 457, donner un brillant exposé des conséquences des principes qu’il adopte, il dit :

"The treatment of the insane ought to be such that we should be able to regard the asylums of the land as one Temple of Health, in which the priests of Esculapius, rivalling the Egyptians and Greeks of old, are constantly ministering, and are sacrificing their time and talents on the altar of Psyche."

Il ne manque à tout cela que la description des habits sacerdotaux des sacrificateurs de Psyché ; car il est évident que la cravate blanche en étouffoir, l’habit noir à queue d’aronde, le pantalon collant et les escarpins de cuir verni breveté ne constitueraient pas un costume d’un goût assez classique, pour un sacerdoce imité des cultes d’Isis et d’Aphrodite, s’exerçant en présence d’élégantes congrégations de fous émancipés par la non-restraint.