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teusement dit adieu : Helas ! quel congé, quel congé, c’est pour jamais, mon Dieu, quel grand congé ! Prononceant ; lesquels mots, elle exclamoit derechef, à la façon de nos criardes femmes de France (car c’est à qui bruya le plus haut) & frappoit de ses mains sur son ventre. De sorte que plusieurs, qui cognoissoient l’humeur de la pelerine, affermoient qu’elle avoit sciemment exclamé sur grand vît, & con j’ay, lieu de congé.

Il y avoit un amoureux, qui avoit longuement idolatré une certaine Chiaude : laquelle, à la façon de nos Poëtes François, il avoit baptisé sa Pandore, du nom de celle qui eut tant de beaux presents des Dieux ; Voyant en fin qu’il perdoit son temps, & en avoit mauvais visage, il la souloit appeller, Ma Pandore, qui de sa chemise le dernier pan dore.

Un Advocat fut un jour bien trompé : car au lieu qu’il pensoit avoir un double ducat, pour salaire d’un gros procez qu’il avoit fueilleté, il ne trouva que le double du cas posé, & s’equivoqua sur la lettre de son client, qui luy escrivoit en ceste sorte : Je vous envoye mon sac, avec un double du cas, je vous prie bien voir tout, & me faire un ample advis, &c.

Jean Rifflart eut un jour querelle contre Jean Camardin, & par desdain luy dit, Allez, allez punais, il ne vous appartient pas de vous prendre à moy. Auquel Camardin respondit, Je ne suis point punais, cocu. Dont Rifflart se sentant injurié, le fit appeller en justice, pour avoir reparation : & fit remonstrer l’attrocité de l’injure, qui pourroit causer un divorce, & troubler son mariage, & fit l’injure si-grande avec demande de si enorme reparation honorable, que chacun pensoit que Rifflart seroit chastié aigrement : Quand son Advocat, dextrement & gaillardement fit tourner le