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Le soir allant vers vous je les payay contant,
N’estois-je pas bien fol d’acheter un con tant ?
Que l’argent fus conté, de si pres vous connu,
Quand nud entre deux draps je tins votre con nu.
Et puis je m’efforçay d’emplir vostre conduit,
Mais a trop engloutir vous avez le con duit.
Neantmoins courageux, & en ardeur confit,
Je fis autant d’exploits qu’autre en vostre con fit :
Et heurtay tant de coups, si bien vous les contez
Qu’oncques faire on ne vit assauts en un con tels.
Je pensois estre un Roy, ou un grand Connestable,
Quand mon courtaut eut fait en vostre con estable,
Ce qui plus m’a folie & mon regret conferme,
Je pensois chevaucher un beau jeune con ferme :
Et c’estoit un trou sale, ou nul ne doit entendre ;
Veu que chacun pour rien venoit vers ce con tendre.
C’estoit une charongne infecte & peu congruë ;
Quoy ? ne fus-je pas bien d’acheter tel con gruë ?
Tous les jours avec vous moines se conjoüyssent,
Gens de toutes façons de vostre con joüyssent,
On y va tour à tour, puis Abbé, puis convent,
Certes femme peu vaut qui donne à son con vent,
On me le disoit bien, mais par ma conscience,
Pour un coup l’on pert sens, & par un con science.
Tout homme devient fol, tant soit sage ou content,
Qui met tout son esprit a aymer un con tant,
on devroit assommer un homme, & le confondre :
Qui sa force & vertu va dedans un con fondre.
L’Homme n’est-il pas fol qui pour se consoler,
Cuide à force de coups jamais un con saouler ?
Combien de hauts esprits en voit-on condamnez,
Et combien de grands clecs sont par un con damnez.