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j’ay de tout temps estimé vaines & ridicules, & croy que plusieurs, s’ils veulent prendre la peine de les considerer, seront de mon advis Car (pour parler librement) quelle asseurance peut estre de bon recueil, & de faveur envers la plus part de ceux ausquels tels livres sont dediez ; veu que, s’ils sont grands Seigneurs, ils n’auront seulement le loisir d’en voir le tiltre, & ne daigneront les regarder que par la couverture si elle est belle & bien dorée ; car la plus part d’iceux prend bien plus grand plaisir d’oüyr discourir de leurs affaires & entendre quelque moyen pour rechauffer leur revenu que de voir tels Discours qu’ils estiment entre-eux des brigue-faveurs ou attrape-deniers : encore que la faveur ne soit que d’un branslement de testes, & de l’austres poinct, rien du tout. Quand à la protection dont ils se veulent prevaloir ; je ne sçay sur quoy ils la fondent : que la plus-part notoirement sont ignares, n’ayans autre doctrine que leurs richesses. Mais quand bien ils seroient sçavans, comme il advient quelquefois, que se soucient ils de se rompre la teste, pour deffendre iceluy qui sans consideration les en prie. J’ay beaucoup veu de reprehensions sur des livres, mais je n’ay point de souvenance d’avoir veu aucuns, auquels ils fussent dediez qui s’en soient remués ne souciés. Quand aux flateurs, estiment ils les personnes si gruës, que de se laisser corrompre par leur langage macquereau & sottes excuses ? Rien moins les bons esprits veulent estre payez en monnoye de bon aloy, & ne laissent pour tout cel, si l’autheur le merite, de luy donner un atteinte. Car quelle excuse merite celuy, qui de certaine science & propos deliberé, commet un acte duquel il peut recevoir honte : Qui est-ce qui le contraint de jetter en public son erreur, puis qu’il estoit en la puissance : celant l’imperfection