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que j’en avois de copie, avec les libres Adjonctions de mots, tant sales & lubriques que vous pourriez dire, pourveu qu’ils soyent ingénieux : car encor que l’autheur ayt voulu avoir esgard aux chastes aureilles, & sciemment obmestre plusieurs propos, si est-ce que luy ayant ouy dire à luy mesme, que c’estoit ipsum evitare Priapum & qu’il avoit, infinis beaux trait, qui perdoient leur grâce sans ceste liberté : j’ay en fin mieux aymé suivre sa conception, que son conseil. Il me pardonnera si je sonde si avant ce qu’il a dans le cœur, & prendray pour ma defence envers luy, ces vers de Catulle :
Caftum esse decet pium Poëtam
Ipsum, versiculos nihil necesse est,
Qui tum denique habent salem & leporem,
Si sunt molliculi & parum pudici.
Et oseray bien dire, que tant s’en faut que cela offence personne (hors-mis quelques hypocrites) qui au contraire cela serviroit a la jeunesse l’advertissement de ne se pas tant amuser à ces recherches curieuses, puis qu’elle les verra icy toutes aprestées & en telle quantité, que l’abondance leur engendrera un desgoust, qui les occasionnera de mettre le nez au bons livres, & lire chose dont ils pourront retirer du fruict : Car je suis ferme en ceste opinion, que la multitude & facilicté grande des livres que nous avons aujourd’huy, abastardissent les esprits de rechercher & lire curieusement les bons livres mesmes quand ils s’estiment asseurez d’avoir des Recueils, qui leur enseignent où gist le lievre, & où sont les viandes toutes mascheés prestes à avaler, quand ils en ont affaire. Quant à la lasciveté, je ne puis penser quelle les puisse tant offenser, que les Priapees de Virgile, Epigrammes de Catulle, de Martial, Amours d’Ovide, Comedies de Terence, Petronius Arbiter : & bref tout ce qui est de plus beau & rare en l’Antiquité, qu’on leur propose, comme choses serieuses & à inviter, devant les yeux ; au lieu que les lascivetez ici rapportées, representent