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D’après l’Acte d’accusation, toute contribution effective à l’activité du parti et du gouvernement nazis constitue la participation au complot, qui est en soi un crime. Le Statut ne définit pas le complot. Or, de l’avis du Tribunal, le complot doit être nettement défini dans son but criminel. Il est proche de la décision et de l’action. Il ne résulte pas des simples énonciations d’un programme politique, telles que les vingt-cinq points du programme nazi proclamé en 1920, ni des affirmations politiques exprimées quelques années plus tard dans Mein Kampf. Il faut donc rechercher s’il y a eu un plan concret de guerre, et qui a participé à ce plan.

Peu importe que les preuves aient montré ou non l’existence d’un complot d’ensemble englobant la prise du pouvoir, l’extension de la domination nazie à tous les domaines de la vie économique et sociale, les projets de guerre. Elles démontrent du moins que, le 5 novembre 1937 au plus tard, ces projets étaient formés, qu’ils eurent pour suite les menaces de guerre et les guerres qui troublèrent la paix de tant de nations. Elles attestent l’existence de plans concertés et successifs plutôt que celle d’un complot les englobant tous. C’est par voie d’étapes que, depuis la prise du pouvoir, l’Allemagne nazie s’acheminait vers la dictature totale et vers la guerre.

Dans la pensée du Tribunal, l’imputation aux accusés de plans concertés et successifs tendant à la guerre d’agression est justifiée par les preuves. Peu importe que celles-ci révèlent avec moins de certitude le vaste programme d’ensemble allégué par l’Acte d’accusation. Cet état de fait est bien exprimé par Paul Schmidt, interprète officiel du ministère des Affaires étrangères d’Allemagne, dans le passage suivant :

« Les buts des dirigeants nazis étaient clairs dès l’origine : c’était, en vue de dominer le continent européen, l’incorporation au Reich des éléments de langue allemande, puis l’expansion territoriale sous le couvert du slogan « Lebensraum ». Mais l’exécution de ces projets essentiels fut improvisée. Les mesures que s’ensuivirent furent dictées par les événements ; mais toutes, elles étaient conformes aux buts que nous venons de rappeler. »

Objectera-t-on que cette notion de plan concerté s’accorde mal avec le régime de la dictature ? Ce serait, à notre sens, une erreur. Ce plan, un seul l’a peut-être conçu. D’autres en sont devenus responsables en prenant part à son exécution, et leur soumission aux ordres du promoteur ne les libère pas de cette responsabilité. Hitler ne pouvait, à lui seul, mener une guerre d’agression. Il lui fallait la collaboration d’hommes d’État, de chefs militaires, de diplomates, de financiers. Quand ceux-ci, en pleine connaissance de cause, lui ont offert leur assistance, ils sont devenus parties au complot qu’il avait ourdi. S’ils furent, entre ses mains, des instruments, la conscience qu’ils en eurent empêche de les reconnaître comme inno-