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Virgine.

Et la comtesse ?Elle est dans une peine extrême,
Et semble partagée entre vous & vous-même.
Je viens de lui vanter vos tendres sentimens,
Elle a rendu justice à leurs empressemens ;
Puis avec un soupir que l’amour a fait naître,
Que n’est-il l’inconnu, m’a-t-elle dit !

Le Marquis.

Que n’est-il l’inconnu, m’a-t-elle dit !Peut-être,
Si je me déclarois, son cœur sans embarras,
Quoique touché pour moi, ne le sentiroit pas.
Ne précipitons rien.

Virgine.

Ne précipitons rien.C’est l’humeur de la dame,
Le mérite la charme, il peut tout sur son ame ;
Mais il faut lui laisser vouloir ce qu’elle veut.

Le Marquis.

L’Amour est consolé quand il fait ce qu’il peut.
Elle paroît ; je vais pousser le stratagême,
Et faire quelque temps le jaloux de moi-même,
C’est le plus sûr moyen d’affermir mon bonheur.



Scène V

LA COMTESSE, LE MARQUIS, VIRGINE.
Le Marquis.

Madame, je vous trouve un air sombre, rêveur ;
Il me gêne, il m’alarme, & cependant je n’ose
Permettre à mon amour d’en demander la cause.
Peut-être, quand mon cœur s’attache tout à vous,
Le vôtre cherche ailleurs des hommages plus doux.
Vous ne répondez point ? Je le voi trop, Madame,
Un autre feu, sans doute, est contraire à ma flamme ;