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Vous demandez la paix, j’y vais porter Achille,
Mais pour ne rendre pas ce projet inutile,
Priam se répond-il que l’injuste Pâris
Veuille céder l’objet dont son cœur est épris ?
Point de salut pour Troie à moins de rendre Hélène.

POLIXÈNE

Pâris a trop d’amour pour la céder sans peine ;
Mais après ce qu’à Troie ont coûté nos combats,
L’intérêt de Pâris ne l’emportera pas.
Si pour lui cette Hélène a toujours mêmes charmes,
C’est peu pour tant de sang qu’il verse quelques larmes,
Et de son désespoir nous craignons peu l’éclat,
Quand son malheur importe au salut de l’État.

BRISEIS

Cet obstacle levé, réglez la paix vous même,
Elle dépend de vous.

POLIXÈNE

Elle dépend de vous. De moi ?

BRISEIS

Elle dépend de vous. De moi ? Pyrrhus vous aime,
Agréez son hymen, la guerre est sans retour.

PYRRHUS

Ah, Princesse, auriez-vous oublié mon amour,
Cet amour dont mon âme heureusement charmée…

POLIXÈNE

Non, Prince, il me souvient que vous m’avez aimée,
Et qu’il m’eut été doux, si le Ciel l’eut permis,
Que l’hymen nous eut fait cesser d’être ennemis.
Le Roi Priam mon père approuva votre flamme,
Je vous dois cet aveu. Souffrez-le moi, Madame,
Un feu de qui la gloire a seule été l’appui
Peut sans honte à vos yeux se déclarer pour lui.
Oui, Prince, de Priam votre amour eut l’estime,
L’espoir qui l’alluma lui parut légitime,
Et l’ordre qui m’en fit autoriser l’ardeur
N’eut rien qui fut contraire au penchant de mon cœur.