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Qu’il consente à l’hymen qui flatte vos souhaits,
Mais ce n’est point assez pour nous donner la paix.
Une trop rude guerre à votre espoir s’oppose,
Il faut pour l’étouffer en supprimer la cause,
Rendre, malgré Pâris, Hélène à Ménélas.

PYRRHUS

Pour apaiser les Grecs que ne fera-t-on pas ?
Après la mort d’Hector que les Dieux ont soufferte,
Troie enfin sans défense est sûre de sa perte.
Tandis que cette mort y fait régner l’effroi,
Gagnez l’esprit d’Achille, et tout sera pour moi,
C’est de là que dépend le repos de ma vie.
Vôtre propre intérêt à parler vous convie.
Pour vous donner la main, vous rendre vos États,
Vous savez qu’il attend la fin de nos combats,
Et qu’il ne veut que voir la guerre terminée
Pour conclure avec vous un heureux hyménée.
Faites votre bonheur en assurant le mien.

BRISEIS

Achille pour ma gloire est un brillant soutien,
Disposer de son cœur c’est être plus que Reine ;
Mais pourrez-vous toucher celui de Polixène ?
Il faut vous l’avouer, si sa beauté vous plaît
Ses larmes dans son sort m’ont fait prendre intérest,
Je sens que ses malheurs attendrissent mon âme,
J’en partage l’atteinte, et malgré votre flamme,
Si le don de sa main contraignoit ses désirs,
Je les écouterois plutôt que vos soupirs ;
Songez ce qu’est un cœur qui s’arrache à soi-même.

PYRRHUS

Je dirois trop peut être en disant qu’elle m’aime,
Mais au moins si le sort ne m’avoit point trahi
Je pourrois me flatter de n’être pas haï.
Dans l’un de nos combats pris par Hector son frère,
Je la vis, et la voir, fut aimer à lui plaire,
Puisqu’en moi sa beauté fit dés le premier jour
D’un Prisonnier de guerre, un prisonnier d’amour.