Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/99

Cette page n’a pas encore été corrigée

Scène V


La tante, Lisette.

Lisette

Madame, vous voyez quel pouvoir est le vôtre :

Tous deux ne sauroient vivre un seul moment sans vous.

La tante

Que n'est-il vrai ! Mais non, ils ont besoin de nous,

Et, venus à Paris pour quelque grande affaire,

Je les dois regarder comme amis de mon frère.

Tu sais ce que pour eux d'Angleterre il m'écrit,

Qu'en leur faveur je tâche à trouver du crédit,

Et que les obliger c'est l'obliger lui-même.

Lisette

Mais ne croyez-vous pas que l'un des deux vous aime?

La tante

J'aurois lieu de le croire, et Léandre du moins

Semble pour me gagner ne manquer point de soins;

Mais enfin je crains tant qu'il ne soit pas honnête,

Qu'à me remarier je me montre si prête...

Lisette

Le veuvage est un don qu'on m'a toujours appris

Que le ciel ne départ qu'à ses plus favoris ;

Et si dans ce qu'on sait par mainte et mainte épreuve

Vous pouviez transporter votre office de veuve,

Au lieu de le garder toujours en enrageant,

Il vous seroit aisé d'en trouver de l'argent.

Malgré des blonds cheveux la mode avantageuse,

Un bandeau sied au front mieux qu'une paresseuse.

Mais, madame, chacun sait ses nécessités.

La tante

II est vrai, le veuvage a ses commodités.