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ACTE IV



Scène I

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OEnarus, Phèdre

OENARUS.

Un si grand changement ne peut trop me surprendre,
J’en ai la certitude, et ne le puis comprendre.
Après ce pur amour dont il suivoit la loi
Thésée à ce qu’il aime ose manquer de foi ?
Dans la rigueur du coup, je ne vois qu’avec crainte
Ce qu’au cœur d’Ariane il doit porter d’atteinte.
J’en tremble ; et si tantôt lui peignant mon amour
Je voulois être plaint, je la plains à son tour.
Perdre un bien qui jamais ne permit d’espérance,
N’est qu’un mal dont le temps calme la violence ;
Mais voir un bel espoir tout à coup avorter,
Passe tous les malheurs qu’on ait à redouter.
C’est du courroux du Ciel la plus funeste preuve.

PHÈDRE.

Ariane, Seigneur, en fait la triste épreuve,
Et si de ses ennuis vous n’arrêtez le cours,
J’ignore, pour le rompre, où chercher du secours.
Son cœur est accablé d’une douleur mortelle.

OENARUS.

Vous ne savez que trop l’amour que j’ai pour elle,
Il veut, il offre tout ; mais hélas ! je crains bien
Que cet amour ne parle, et qu’il n’obtienne rien.
Si Thésée a changé, j’en serai responsable.
C’est dans ma Cour qu’il trouve un autre Objet aimable,
Et sans doute on voudra que je sois le garant
De l’hommage inconnu que sa flamme lui rend.