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Pour croire qu’à ma mort son injustice aspire.

NÉRINE.

Pirithoüs ne dit que ce qu’il lui fait dire ;
Et quand il a voulu l’attendre si longtemps,
Ce n’étoit qu’un prétexte à ses feux inconstants.
Il nourrissoit dès lors l’ardeur qui le domine.

ARIANE.

Ah, que me fais-tu voir, trop cruelle Nérine ?
Sur le gouffre des maux qui me vont abîmer,
Pourquoi m’ouvrir les yeux quand je les veux fermer ?
Hélas ! Il est donc vrai que mon âme abusée
N’adoroit qu’un Ingrat en adorant Thésée ?
Dieux, contre un tel ennui soutenez ma raison,
Elle cède à l’horreur de cette trahison ;
Je la sens qui déjà… Mais quand elle s’égare,
Pourquoi la regretter cette raison barbare,
Qui ne peut plus servir qu’à me faire mieux voir
Le sujet de ma rage et de mon désespoir ?
Quoi, Nérine, pour prix de l’amour le plus tendre…


Scène VII


Ariane, Phèdre, Nérine

ARIANE.

Ah, ma Soeur, savez-vous ce qu’on vient de m’apprendre ?
Vous avez cru Thésée un Héros tout parfoit,
Vous l’estimiez sans doute ; et qui ne l’eût pas fait ?
N’attendez plus de foi, plus d’honneur, tout chancelle,
Tout doit être suspect, Thésée est infidèle.

PHÈDRE.

Quoi, Thésée…

ARIANE.

Oui, ma Sœur, après ce qu’il me doit,
Me quitter est le prix que ma flamme en reçoit,