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Mon cœur se sent touché de ce que je vous dois,
Et voudroit être à vous s’il pouvoit être à moi ;
Mais il perdroit le prix dont vous le croyez être ;
Si l’infidélité vous en rendoit le maître.
Thésée y règne seul, et s’y trouve adoré.
Dès la première fois je vous l’ai déclaré,
Dès la première fois…

OENARUS.

C’en est assez, Madame.
Thésée a mérité que vous payiez sa flamme.
Pour lui, Pirithoüs arrivé dans ma Cour
Va presser votre hymen, choisissez-en le jour.
S’il faut que je donne ordre à l’apprêt nécessaire,
Parlez, il me suffit que ce sera vous plaire,
J’exécuterai tout. Peut-être il seroit mieux
De vouloir épargner ce supplice à mes yeux.
Que doit faire le coup, si l’image me tue ?
Mais je me priverois par là de votre vue.
C’est ce qui peut surtout aigrir mon désespoir,
Et j’aime mieux mourir que cesser de vous voir.


Scène III


OEnarus, Thésés, Ariane, Nérine

OENARUS.

Prince, mon trouble parle ; et quand je voudrois taire
Le supplice où m’expose un destin trop contraire,
De mes yeux interdits la confuse langueur
Trahiroit malgré moi le secret de mon cœur.
J’aime, et de cet amour dont j’adore les charmes,
La Princesse est l’objet, n’en prenez point d’alarmes.
Au point de votre hymen vous en faire l’aveu,
C’est vous montrer assez ce qu’est un si beau feu.