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L’amour qui tint pour moi son courroux suspendu,
M’apprend à ses bontés quel sacrifice est dû.
Il l’attend, et ne veut que ce cœur infidèle,
Ce cœur jusqu’à ce jour à ses ordres rebelle.
Enfin (et vos soupirs l’ont sans doute obtenu)
De mes égarements me voilà revenu.
Plus de remise, il faut qu’aux yeux de tout le monde,
À mes folles erreurs mon repentir réponde,
Que j’efface, en changeant mes criminels désirs,
L’empressement fatal que j’eus pour les plaisirs,
Et tâche à réparer par une ardeur égale,
Ce que mes passions ont causé de scandale.
C’est à quoi tous mes vœux aujourd’hui sont portés,
Et je devrai beaucoup, Monsieur, à vos bontés,
Si dans le changement où ce retour m’engage,
Vous me daignez choisir quelque saint Personnage,
Qui me servant de Guide, ait soin de me montrer
À bien suivre la route où je m’en vais entrer.

Dom Louis

Ah ! Qu’aisément un Fils trouve le cœur d’un Père,
Prêt au moindre remords à calmer sa colère !
Quels que soient les chagrins que par vous j’ai reçus,
Vous vous en repentez, je ne m’en souviens plus.
Tout vous porte à gagner cette grande victoire,
L’intérêt du salut, celui de votre gloire ;
Combattez, et surtout ne vous relâchez pas.
Mais dans cette Campagne, où s’adressent vos pas ?
J’ai sorti de la Ville exprès pour une affaire,
Où dès hier ma présence étoit fort nécessaire,
Et j’ai voulu marcher un moment au retour.
Mon Carrosse m’attend à ce premier détour,
Venez.

Dom Juan

Non, aujourd’hui souffrez-moi l’avantage
D’un peu de solitude au prochain Hermitage.
C’est là que retiré, loin du monde et du bruit,
Pour m’offrir mieux au Ciel je veux passer la nuit.