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En vain contre ce cœur que je crûs obtenir,
La fierté d’Ildegonde aura voulu tenir.
Un Trône adoucit tout, et le titre de Reine,
Sitôt qu’il est offert, ne soufre plus de haine.
L’orgueil le plus farouche est par lui désarmé,
Théodat peut l’offrir, Théodat est aimé.
Il est aimé ? Non, non, avant qu’il puisse l’être,
Il ne m’a pas connue, il pourra me connoître,
Je règne encor, qu’il tremble. Oui, loin d’épargner rien,
S’il faut percer mon cœur pour aller jusqu’au sien,
Sans pitié de moi-même, et toute à ma vengeance…

GEPILDE.

Cachez ce mouvement, le voici qui s’avance.


Scène VI


Amalasonte, Théodat, Gepilde.

THÉODAT.

Je ne viens point, Madame, en insolent vainqueur,
Braver votre colère, ou blâmer sa rigueur.
Plus irrité que vous de tout ce qui se passe,
Je viens en criminel vous demander ma grâce.
Sans moi, sans mon aveu quoi que l’on ait osé,
Tout le crime est à moi, puis que je l’ai causé.
Mais si de son succès ma passion abuse,
De ma coupable audace Ildegonde est l’excuse,
Et ce n’est qu’à genoux que je veux obtenir
Qu’au moins vous suspendiez l’ordre de m’en punir.

AMALASONTE.

Levez-vous, Théodat. Il faut que je l’avoue,
Le Ciel veut que de vous malgré moi je me loue.
D’abord, en vous voyant, j’avois crû contre vous
Devoir faire éclater le plus ardent courroux.