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ILDEGONDE.

Ma gloire là-dessus n’a rien à me permettre.
J’ai souffert qu’Honoric fît éclater son feu,
Qu’il tâchât de la Reine à mériter l’aveu ;
S’il l’obtient, et qu’il faille aujourd’hui…

THÉODAT.

Quoi, Madame,
L’amour a donc si peu de pouvoir sur votre âme…

ILDEGONDE.

Moi, de l’amour ! Gardez de l’oser présumer.
Non, c’en est fait, jamais je ne vous veux aimer.

THÉODAT.

Et moi, Madame, et moi qui n’ai point d’autre envie
Que de vous adorer le reste de ma vie,
Je ferai tant qu’enfin j’obtiendrai quelque jour…

ILDEGONDE.

Ah, craignez d’écouter ce dangereux amour,
Il vous perdroit. Suivons nos fières destinées.
On ne se moque point des têtes couronnées.
La Reine a crû pour vous ne pouvoir trop oser,
Elle s’est déclarée, il la faut épouser,
Le trône rend pour vous cet hymen nécessaire.

THÉODAT.

Le trône ! En vous perdant, a-t-il de quoi me plaire ?
En vain à m’y placer la Reine se résout,
Ne me l’opposez point, j’en viendrai bien à bout.
Non que j’aie à douter qu’une pareille offense
N’arme contre mes jours sa plus fière vengeance ;
Mais s’il faut éclater, j’en essuierai les coups,
Plutôt que de trahir l’amour que j’ai pour vous.
Dites-moi seulement que quoi qu’Honoric fasse,
Jamais de son espoir vous n’avouerez l’audace,
Que toujours vos refus par d’obstinés combats…

ILDEGONDE.

Ma gloire en souffriroit, ne le demandez pas.
Si la Reine consent que je sois sa conquête,
J’ai promis d’être à lui, ma main est toute preste.