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Si j’avois expliqué ce qui m’a fait agir,
Vous vous repentiriez de m’avoir fait rougir.
J’en fais gloire, on le sait, je hais les injustices ;
Ainsi vos grands exploits, vos importants services,
Sur ce qui vous est dû m’ont trop ouvert les yeux,
Pour ne vous faire pas un destin glorieux.
Mais lors que mes faveurs justement attendues
Avec profusion sur vous sont répandues,
Théodat, pense-t-il qu’au rang où je le mets,
Sur son mérite seul je règle mes bienfaits ?

THÉODAT.

Moi, Madame, j’aurois un orgueil si coupable ?
Jugez mieux de mon cœur, il n’en est point capable.
Tous ces biens, ces honneurs l’un à l’autre ajoutés,
Je sais que je les dois à vos seules bontés.
D’un si brillant destin m’accordant l’avantage,
Vous avez voulu faire admirer votre ouvrage,
Et par l’éclat du rang que Théodat obtient,
Apprendre à révérer la main qui le soutient.
C’est tout ce que j’en dois, tout ce que j’en veux croire ;
Quelle autre cause eut pu m’attirer tant de gloire,
Vous faire à mes conseils confier vos États ?

AMALASONTE.

Puis que vous l’ignorez, elle ne vous plaît pas.
Tout autre pénétrant le chagrin qui m’emporte,
Aurait déjà connu…J’en dis trop mais n’importe,
Ma raison malgré moi commence à se troubler ;
Si ma gloire s’en plaint, c’est à vous de trembler.
Je vous l’ai déjà dit, vous avez dû prétendre
Tout l’éclat que sur vous j’ai tâché de répandre ;
Mais quoi que bien souvent il soit de l’équité
D’aller jusqu’à l’excès pour qui l’a mérité,
Il est des mouvements où le cœur se dispense
Plus obligeants, plus doux que la reconnoissance,
Des mouvements dont rien ne borne le pouvoir,
Qui donnent sans réserve, et je les puis avoir.
Ce sont eux que tout autre…