Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/235

Cette page n’a pas encore été corrigée

Scène VI

Flaminius, Prusias, Araxe

Prusias

N’épargnez point mon zèle en ce péril indigne.
Après deux ans d’asile Annibal qui me fuit
De ma fidélité me peut ravir le fruit,
Vous troubler chez Attale ; et de cette entreprise
J’empêcherois le coup en retenant Élise.
Parlez, et dans ma Cour je la fais arrêter.

Flaminius

Votre amitié pour nous ne peut mieux éclater,
Seigneur, et j’aurai soin que Rome soit instruite
Du procédé d’Attale, et de votre conduite.
Mais vous défendrez-vous d’admirer avec moi
Jusqu’où l’orgueil du Trône enfle ce jeune Roi ?
Pour l’empêcher d’aimer il n’est rien qui l’étonne.

Prusias

On s’oublie aisément avec une Couronne.
Il est jeune, et l’amour qu’anime la fierté,
Va plus loin quelquefois que l’on n’a projeté.
Ainsi voyez, Seigneur, ce que Rome hasarde
À souffrir qu’Annibal…

Flaminius

C’est à quoi je prends garde ;
Mais aussi je ne puis voir tout à coup perdus
Les services qu’Attale au Sénat a rendus
Eumène comme lui toujours ardent, fidèle,
En cent occasions nous a marqué son zèle,
Et Rome se plaindroit si contre ses souhaits
Je rallumois la guerre où j’apportai la paix.
C’est par là que d’un feu que suit un peu d’audace
Attale a mérité que nous lui fassions grâce,