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Aujourd’hui que sa mort m’assure sa Couronne,
Je croirois faire outrage au Ciel qui me la donne,
Si dans ce nouveau rang j’avois rien de plus doux
Que chercher les moyens de m’acquitter vers vous.
Quoi qu’Eumène…

Prusias

Seigneur, ne parlons plus d’Eumène.
Il eût nourri pour nous une éternelle haine,
Et malgré vous, l’honneur vous eût fait une loi
De suivre le destin et d’un frère, et d’un Roi.
En vain brisant vos fers je pensai le contraindre ;
À redouter les maux que je voyois à craindre ;
Son orgueil ne lui put endurer d’autre accord
Que de promettre aux Dieux ma défaite, ou sa mort.
Cette mort que pour nous ils crurent nécessaire,
Ne m’a plus laissé voir d’ennemi dans son frère,
Et la paix vous semblant le pari le plus doux,
Je suis ici venu la jurer avec vous
Rome a choisi ce lieu commun à l’un et l’autre,
Il borne mon État comme il borne le vôtre,
Et c’est là qu’avec joie on m’a vu vous céder
Ce que Flaminius n’eût osé demander.
Quoi que m’ait pu sur vous acquérir la victoire,
Je ne m’en suis voulu réserver que la gloire.
Pergame est tout à vous, et je vous ai rendu
Ce qu’à droit de conquête on sait qui m’étoit dû.

Attale

Ce rare et grand effort d’une vertu sublime
De l’Univers entier vous assure l’estime ;
Mais, Seigneur, tant de biens sont pour moi superflus,
Si vous devant beaucoup je n’obtiens encor plus.
Quand voulant entre nous voir la guerre finie
Vous brisâtes mes fers dans votre Bithynie,
Déjà depuis longtemps charmé dans cette Cour,
J’étois moins Prisonnier de guerre que d’amour.
Deux beaux yeux en secret captivoient ma franchise.
J’avois, j’avois trop vu l’incomparable Élise.