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candeur,

Tant d'honnêteté jointe à l'ardeur la plus sage

Que, pour quelque repos que m'offre le veuvage,

Je ne me croirois pas être digne du jour

Si je désespérais plus longtemps votre amour.

Perdez donc ce chagrin que votre front déploie.

Vous voulez m'épouser ; j'y consens avec joie ;

Votre peine par là trouve une heureuse fin.

Oronte

Madame, à tant de gloire élever mon destin!

Mais que dis-je! insensé, c'est bien mal me connoître;

Vous êtes généreuse, et je dois aussi l'être.

Le baron d'Albikrac, charmé de vos appas,

Vous mettra dans un rang où je ne vous mets pas ;

Vous en puis-je sans crime envier l'avantage ?

La tante

Je vous l'ai déjà dit, vous avez de l'ombrage ;

Mais pour vous en guérir il nous faut sans façon

Faire épouser ma nièce à monsieur le baron.

De quoi se plaindra-t-il? elle est jeune, assez belle.

Oronte

Ce n'est point mal pensé; mais répondez-vous d'elle?

Vous lui faites sans cesse un monstre de l'amour ;

Et je crains...

La tante

Agissons chacun à notre tour.

Tirez-la quelquefois'à l'écart, et lui dites

Que le baron me choque avecque ses visites,

Et que s'il lui plaisoit vous pourriez m'obliger ,

A souffrir que pour elle il voulût s'engager.

Je favoriserai toutes vos confidences.

Oronte

C'est agréablement flatter mes espérances.

Je n'épargnerai rien afin de la toucher ;

Mais il ne faudra pas d'abord l'effaroucher.

Comme sans intérêt je lui ferai connoitre

Qu'une fille se perd à vouloir toujours l'être,

Le temps fera le reste ; et prenant toujours soin...

La tante