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Mais je sais qu'un motif que je crois généreux

M'oblige à souhaiter que vous soyez heureux.

Qu'à vous combler de gloire à l'envi tout conspire.

Oronte

Ce souhait est beaucoup ; mais, si j'ose le dire,

Dans ce que vos appas ont pour moi d'engageant,

S'il n'est que généreux il n'est point obligeant.

A moins qu'il soit l'effet d'une estime empressée,

D'un tendre mouvement où vous soyez forcée,

D'une inquiète ardeur...

 
Angélique

Ah! que vous me gênez !

J'ai bien peur de savoir ce que vous m'apprenez.

Ne l'examinons point; et, quoi qu'il en puisse être...

Oronte

Craignez-vous de m'aimer?

 
Angélique

Je le fais mal paraître;

Mais au moins je devrois, malgré vos vœux soumis,

Craindre de vous aimer plus qu'il ne m'est permis.

Oronte

Hélas ! le pouvez-vous quand ma flamme est extrême,

Et que l'amour n'a point d'autre prix que lui-même?

Non, quoi que vous fassiez pour vaincre le souci...

 
Angélique

N'est-ce point déjà trop que vous souffrir ici?

J'en rougis ; et s'il faut que ma tante soupçonne...

Oronte

A ce scrupule en vain votre esprit s'abandonne,

Lisette y met bon ordre, et seconde mon feu;

Il s'agit seulement d'obtenir votre aveu,

Me l'accorderez-vous?

 
Angélique

Ce qu'ici je hasarde

Ne vous répond que trop de ce qui me regarde ;

Mais songez que les lois d'un rigoureux devoir

Me forcent d'une tante à craindre le pouvoir,