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Eh ! si l'une s'en plaint l'autre.le trouve doux.

Dans la fleur de nos ans, où tout aime à nous rire,

C'est gloire que de nous on s'attache à médire ;

Et j'en sais qu'on verroit pester au dernier point

Si de leurs soupirans on ne médisoit point.

Les belles à l'envi tirent de ce murmure

Du côté du mérite un favorable augure :

C'en est aussi la marque, et, sans expliquer rien,

Si l'on a leurs faveurs on les achète bien ;

Mais dans l’âge où pour nous manque la complaisance

Malheur à qui ne fait taire la médisance.

Grand opprobre, madame.

La tante

Il est rude en tout temps.

Lisette

Et beaucoup' plus encor quand on a nombre d'ans.

Croyez-moi, sur ce point la médisance est vraie :

Etant vieille l'on n'a que les amans qu'on paie ;

Et je laisse à juger la belle passion

Qui s'allume ou s'éteint selon la pension !

La tante

Ah ! Lisette !

Lisette

Excusez, je parle avec franchise.

La tante

En cst-il ?...

Lisette

Non, témoin notre vieille marquise,

Qui, ne pouvant trouver de galant tout entier,

Se contente, dit-on, qu'on serve par quartier.

Pour quatre pensions il faut bonne finance.

La tante

Et puis n'ai-je pas lieu de fuir la médisance ?

Lisette

Oui, sans doute, et de vous on en diroit aillant.

Mais en fait d'un mari ne barguignez point tant.

Le vouloir jeune et riche...

La tante