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ISABELLE.

Vous me ferez reproche en cas que je vous trompe.

LÉONOR.

Il faut vous l’avouer, si Dom Fernand me plaît,
Dès l’abord, comme vous, je vis tout ce qu’il est,
Le cœur grand, l’ame belle, une entiere franchise ;
Mais de ses sentimens je craignois la surprise,
Les plus prompts quelquefois ne sont pas les meilleurs.

ISABELLE.

À vous dire le vrai, je le connois d’ailleurs.
Un ami qui d’erreur est assez incapable,
M’en avoit déja fait une peinture aimable,
Dont les traits délicats, ayant gagné ma foi,
Ne m’avoient rien caché de tout ce que j’y voi.
L’air, la mine, l’esprit, enfin tout se rapporte.

D. FERNAND.

Je lui suis obligé d’une estime si forte.

ISABELLE.

Jamais d’un vrai mérite on ne fit plus de cas.

LÉONOR.

Et c’est ?

ISABELLE.

Et c’est ?Dom Dionis.

D. FERNAND.

Et c’est ?Dom Dionis.Je ne le connois pas.

ISABELLE.

Ne le connoître pas ? Certes cela m’étonne ;
Vous est-il inconnu, s’il ne l’est à personne ?
Un Cavalier civil, poli, galant, parfait,
Qui, pensant ce qu’il dit, plaît dans tout ce qu’il fait,
Point fourbe, point trompeur, point de ces lâches ames
Qui cherchent en tous lieux à promener leurs flammes ;
Et, d’ailleurs, il se dit de vos meilleurs Amis.

D. FERNAND.

L’erreur m’est favorable, où quelque abus l’a mis.