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Comme pour elle seule on m’a vu la chérir,
Quand elle veut ma mort il m’est doux de mourir,
Assure-t-en, Phénice, et que jamais une âme…"
Son cœur pousse à ces mots un soupir tout de flamme ;
Ses regards sur les miens s’arrêtent tristement,
Il nomme la Princesse, et meurt en la nommant.

philippe

Et bien es-tu content, malheureux Politique ?
Le Ciel selon tes vœux pour ta grandeur s’explique,
Et si Rome aspiroit à te faire la loi,
Aux dépens de ton sang enfin te voilà Roi.
Satisfois tout l’orgueil de ce fier caractère,
Tu ne le peux remplir qu’en cessant d’être père.
Un fils te reste encor ; ose, achève, et ne crains
Ni la foudre des Dieux, ni celle des Romains.
C’est lui dont les soupçons pressant ta défiance
Ont fait servir ta crainte à sa lâche vengeance.
Le sang contre le sang à la fin t’a séduit,
Et cette mort funeste en est l’indigne fruit.
Fuyez, fuyez, Madame, un père abominable.
On partage un forfait à souffrir le coupable
Rentrez dans votre Thrace où les Dieux ennemis
Pour régner avec vous ont refusé mon fils,
Ce fils que de ma rage ils ont fait la victime,
Ce fils…

érixène

C’est trop, Seigneur, vous charger de mon crime.
L’accablement stupide où mes sens sont forcés
De la main qui le perd vous éclaircit assez.
Je l’aimois, et Didas me donnant lieu de croire
Qu’un choix et bas et lâche avoit souillé sa gloire,
Jalouse autant que fière, aux dépens de mon feu,
Je l’ai voulu punir d’un trop honteux aveu.
Sa mort en est l’effet, et quand j’en sens l’atteinte,
N’attendez point qu’ici je m’arrête à la plainte.
Je sais ce qu’on doit faire en de pareils malheurs.
Pour le sang d’un Héros c’est trop peu que des pleurs.