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Et sans voir quelle part l’amour y peut avoir,
Il suffit qu’un grand cœur sait toujours son devoir.
Ainsi j’envierai peu le bien que je vous laisse
Quand ce devoir pour moi pressera la Princesse.
Content de cet appui, sans en être alarmé,
Je verrai qu’en secret vous vous croyez aimé,
Et tandis que demain, au défaut de sa flamme,
Sa foi m’assurera l’empire de son âme,
J’abandonne sans peine à vos désirs jaloux
La douceur de penser que son cœur est à vous.

démétrius

Et bien dédaignez-en la charmante conquête,
Mais quand un coup affreux menace notre tête,
Si la pitié partout a des droits assurés,
Prenez-en d’un amant que vous désespérez,
D’un amant qui se perd dans l’ennui qui le presse.
Seigneur, au nom des Dieux laissez-moi ma Princesse,
De quelque aimable Objet cherchez ailleurs la foi,
Il en est tant pour vous, il n’en est plus pour moi.
Dans le fatal revers dont je vois la menace,
Jugez jusqu’où s’étend l’horreur de ma disgrâce,
Puisque pour tout refuge en de si rudes coups
Elle peut me réduire à n’espérer qu’en vous,
En vous de qui la haine à ma perte animée
Du plus âpre courroux tient votre âme enflammée,
Du plus âpre courroux tient tout prêt de combler
Le mortel désespoir qui me doit accabler.
Je le sais, je le vois, mon cœur en sent l’outrage,
Il s’en émeut de honte, il en frémit de rage,
Et toutefois ce cœur qui ne sauroit céder,
Sûr de n’obtenir rien, s’obstine à demander.

persée

Pendant votre triomphe on a vu ma constance
Faire un si long assai d’aimer sans espérance,
Qu’il vous sera moins dur de voir qu’à votre tour
Une vertu si rare exerce votre amour ;