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Tous deux Chefs de parti nous cherchons la victoire,
Et quand sur vous enfin j’en emporte la gloire,
Ma haine, dites-vous, si l’on ne m’eût cédé,
Par un combat sanglant en auroit décidé.
Quelle plainte, grands Dieux, et qu’elle a de foiblesse !
Vous fûtes le témoin de ce combat d’adresse,
Seigneur, et vous savez ce qu’on me vit tenter,
Qui marque la fureur qu’il ose m’imputer ;
Mais la sienne, qu’anime une haine implacable,
Ne veut rien épargner pour me rendre coupable.
Dans la fête qu’ensuite on me voit ordonner
Je l’invite au festin, c’est pour l’empoisonner.
Sans nommer les témoins d’une trame si noire,
J’en suis trop convaincu parce qu’il la veut croire.
Le fer enfin succède, on me fait tout oser.
Prince, m’accuser trop, ce n’est pas m’accuser.
Pour rendre contre moi vos plaintes légitimes,
Un seul jour me pouvoit amasser moins de crimes
Je vais chez vous de nuit, et l’on doit soupçonner
Que j’y vais seulement pour vous assassiner ?
Puisque de ce forfait vous avez des indices,
J’étois accompagné, je livre mes Complices,
Qu’ils viennent, et par eux faites connoître à tous
L’ordre d’un attentat qu’ils apprendront de vous.
Mais que sert contre moi d’inventer cette fable ?
De tant de crimes faux passons au véritable.
Que ne me dites-vous, puisqu’il faut l’exprimer,
Pourquoi, Démétrius, t’es-tu fait estimer ?
Pourquoi de ta vertu la Macédoine éprise
Me voit-elle à regret une Couronne acquise,
Et quand de ma conduite on la voit s’indigner,
Pourquoi lui parois-tu plus digne de régner ?
Quelques déguisements qui cachent sa pensée,
C’est là, Seigneur, c’est là ce qui blesse Persée,
Et l’on s’empresseroit bien moins à me trahir,
Si par mes lâchetés je me faisois haïr ;