Et sans qu'il vous demeure aucun soupçon d'abus,
Si vous voulez qu'il règne, il montrera Pyrrhus. [1500]
Il m'est assez connu ; mais quand on me dédaigne,
Ne sachant si je veux qu'il périsse ou qu'il règne,
Je sais bien seulement qu'un désespoir fatal
Ne me laisse songer qu'à punir mon rival.
Si sur un rival seul doit tomber votre haine, [1505]
Vous le voyez en moi, résolvez de ma peine.
J'aime Déidamie, et mon coeur enflammé
Dérobe à vos désirs la douceur d'être aimé.
Quoi, c'est peu qu'à mes voeux votre fierté contraire
Ait dédaigné pour moi d'user des droits de frère ; [1510]
Si j'attaque un rival je vous vois lâchement,
Pour braver ma vengeance, affecter d'être Amant ?
Non, non, c'est un secret qu'il ne faut plus vous taire.
Hippias est Pyrrhus, je ne suis point son frère,
Et quand j'aime en effet, c'est sans rien affecter [1515]
Qu'une si belle ardeur fait gloire d'éclater.
Jamais ni feu plus pur, ni passion plus tendre...
Qu'aux feintes de sa soeur Pyrrhus se puisse rendre,
Qu'il soit prêt à céder un trône sur sa foi !
L'Amour est mon Oracle, et c'est lui que j'en crois [1520]
L'heureux titre d'Amant qu'il permet à ma flamme,
Malgré ce que je perds, remplit toute mon âme.
Je cède une Couronne, et dois la dédaigner
Quand je vois qu'Hippias a droit seul de régner ;
Assez et trop longtemps mon sort lui fait injure. [1525]
Il fallait avec lui concerter l'imposture,
Et de Pyrrhus peut-être on m'aurait fait douter,
S'il en eût pris le nom quand vous l'oser quitter.