Scène VI
C'est donc votre amour seul qui de mon sort décide,
Madame ? Mais ô Dieux ! Qui l'aurait présumé
Que de vous en secret Hippias fût aimer ? [1180]
Que pour lui votre coeur...
Gardez de vous en plaindre,
Son mérite lui seul aurait dû m'y contraindre,
Quand ce coeur qu'un tyran me force de trahir,
Aux ordres de ma Mère aurait craint d'obéir.
Par elle je l'aimai même sans le connaître, [1185]
Mais enfin de mon feu mon devoir est le maître,
Et quand vos jours par moi se peuvent conserver,
Je consens à me perdre afin de vous sauver.
Quoi, vous épouseriez...
Telle est ma destinée.
J'en vivrai sans repos, toujours infortunée, [1190]
Mais à vos intérêts je dois tout immoler.
Ma raison se confond à vous ouïr parler,
Vous qui loin que jamais vous m'ayez fait entendre...
La Reine expressément me l'avait su défendre,
De peur que trop d'ardeur échauffant vos esprits [1195]
Ne trahit le secret que je vous eusse appris.
