II}}
Seigneur, tout de nouveau Pyrrhus m'a fait savoir [535]
Ce que pour moi sur vous l'amour a de pouvoir,
Que toujours même ardeur pour mon hymen vous presse ;
Mais avant qu'achever celui de la Princesse,
Si cet amour est tel qu'il vient de m'assurer,
Quelle marque de vous pourrai-je en espérer ? [540]
L'obtiendrais-je aisément d'un peu de confiance ?
Sur de nouveaux serments prenez-en l'assurance,
Pourvu qu'à votre tour sensible à ce beau feu
Vous lui daigniez enfin accorder votre aveu.
Des mouvements du coeur le temps seul est le maître [545]
Lorsqu'il s'ouvre à l'Amour c'est lui qui l'y fait naître,
Et ce que précipite un pouvoir trop pressant,
N'est qu'un Monstre sans forme, et qui meurt en naissant,
Je vous l'ai dit, Seigneur.
À vous parler sans feinte,
Ce grand pouvoir du temps affaiblit peu ma crainte ; [550]
Non que sur le secours que vous m'en promettez
Mes voeux de quelque espoir ne soient encor flattés ;
Mais s'il se peut qu'enfin ma main vous doive plaire
Jusque-là pour Pyrrhus il est bon qu'on diffère,