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Et que ce qui suivra nous aura fait juger [375]

Que Pyrrhus découvert ne court aucun danger.

DÉIDAMIE

Vous croyez donc qu'alors le Roi verra sans peine

La Princesse par vous hors d'espoir d'être Reine ?

Femme de votre fils pourra-t-elle régner ?

ANDROCLIDE

Cette crainte est un mal que je veux m'épargner. [380]

Comme le temps peut tout, j'espère...

DÉIDAMIE

Point d'excuse,

Ce zèle va trop loin pour souffrir qu'il m'abuse.

Allons sans différer montrer Pyrrhus au Roi,

C'est mon frère, et j'en prends tout le péril sur moi.

ANDROCLIDE

Vous pouvez lui montrer le vrai Roi de l'Épire ; [385]

J'y consens, mais pour moi je n'ai rien à lui dire.

DÉIDAMIE

Quoi, si pour s'éclaircir il lui faut votre aveu...

ANDROCLIDE

Pourvu qu'il vous en croie il vous importe peu.

Allez, Madame, allez.

DÉIDAMIE

Que faut-il que je pense ?

ANDROCLIDE

Que je vois pour mon fils le trône en ma puissance, [390]

Que mon orgueil s'en flatte, et qu'il n'est rien pour moi

Qui vaille la douceur de faire ce fils Roi.

DÉIDAMIE

Faire un Roi de ton fils ! Que me fait-on connaître ?

Androclide est un lâche, Androclide est un traître !

J'ai cru qu'au seul Pyrrhus son zèle était acquis, [395]

Et le fourbe agissait pour couronner son fils.

ANDROCLIDE

Les périls dès l'enfance où j'exposai sa tête

Ont fait pour lui du Sceptre une juste conquête,