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Et qu'en ce lieu choisi pour traiter de la Paix, [295]

Vos soins à l'arrêter comblèrent nos souhaits,

Votre entretien dès lors eut pour moi tant de charmes,

Qu'en me livrant au Roi je restai sans alarmes,

Et quoi qu'il m'arrivât, je crus mon sort bien doux

Puisqu'il m'était permis de m'approcher de vous. [300]

Tous les jours je vous vois, mais malgré cette joie

Je n'ai point de repos que je ne vous revoie,

Ce bonheur est le seul dont mon coeur soit jaloux,

Avec vous tout me plaît, tout me déplaît sans vous.

Sans cesse je voudrais vous dire, je vous aime, [305]

Sans cesse vous ouïr me le dire de même,

Qu'à l'envi l'un de l'autre un aimable transport

De l'amitié sans cesse accrût en nous l'effort,

Que tout ce qu'a de tendre... Hélas ! Faites-moi taire,

Ma soeur, j'en dirais trop sans doute pour un frère, [310]

Et si vous moins aimer n'est pas en mon pouvoir,

J'ai tort de dire plus que l'on ne doit savoir.

DÉIDAMIE

Je ne puis trop connaître une amitié si chère.

Sa tendresse a pour moi tout ce qui peut me plaire,

Et plus cette tendresse en étreindra les noeuds... [315]

HIPPIAS

Ah, s'il était ainsi que je serais heureux !

Que votre âme à la mienne étroitement unie...

Mais encor une fois je sens que je m'oublie,

Daignez n'y point songer, ma soeur, et dites-moi

Ce que de votre part je dois répondre au Roi. [320]

DÉIDAMIE

Au seul secours du temps ayant su le remettre,

S'il doit plus espérer, c'est à vous de promettre.

Vous seul...

HIPPIAS

À quelque espoir qu'il s'ose abandonner,

Son bonheur est mal sûr si j'en dois ordonner.