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Mais au moins apprends-nous quel pressent intérêt
L’a contraint de ma mort à prononcer l’arrêt.
Quand par un noble effort que l’Univers admire,
Pour régner sur soi-même il a quitté l’Empire,
Veux-tu que par un crime aussi noir que honteux
L’objet de son mépris soit celui de ses vœux ?

sévère.

À quoi qu’en sa faveur un tel mépris vous force,
L’éclat d’une Couronne est une douce amorce,
Et quiconque du Trône a goûté les appas,
En conçoit mieux le prix quand il n’en jouit pas.
À son ambition vous serviez de victime,
Il m’a dit son secret, et c’est là tout mon crime.
J’ai vu l’Impératrice, et cru que ses avis
Pour rompre l’attentat devoient être suivis.
Ce billet prévenant de lâches artifices
Dérobe votre sang aux fureurs des Complices,
Qui par Maximian secrètement armés
À l’envie contre vous se fussent animés.
Votre perte étoit sûre à les vouloir entendre,
Leur crime découvert le pressoit d’entreprendre,
Il voyoit tout facile, et Licine arrêté
Faisoit de ses desseins l’entière sûreté.
C’est à vous là-dessus d’être Juge équitable,
Licine est innocent, vous voyez le Coupable,
Et j’expose à vos yeux, sans plus rien vous cacher,
Tout ce que dans son crime on peut me reprocher.

constantin.

Mais si par ce Billet sa trahison connue
Ne t’en eût pas fait voir la rage prévenue,
Sans nommer le Coupable, et me rien découvrir,
Ton jaloux désespoir m’auroit laissé périr ?

sévère.

Pour l’arracher au crime où le Trône l’engage,
J’aurois mis en secret toute chose en usage,
Et si tous mes efforts n’eussent pu l’émouvoir,
Le péril redoublant je savois mon devoir.