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Qu’à lui seul le devoir vous fait l’assujettir,
Mais l’Empereur n’est plus si j’y veux consentir.

fauste.

On en veut à ses jours ?

sévère.

Oui, Madame, on conspire,
On cherche à lui ravir et le jour et l’Empire,
Et si je tiens secret l’attentat entrepris,
Sans avoir part au crime on me répond du prix.
L’image de sa mort à votre esprit offerte
Ne me montrera point complice de sa perte,
Et dans le coup fatal qu’on veut faire éclater
Vous plaindrez son malheur sans me rien imputer.
Pour changer de Fortune il ne faut que me taire,
Tous mes maux sont finis, on me venge, et j’espère ;
Mais mon cœur succombant à des projets si bas,
Pour les cacher à tous ne me les cache pas.
Si jusqu’au plus haut point ma disgrâce est montée,
Du moins je veux mourir sans l’avoir méritée,
Et j’aurai l’avantage en ce funeste jour
D’emporter votre estime en perdant votre amour.

fauste.

En vain à vous l’ôter on voudroit me contraindre ;
Mais je n’ai rien à dire où je vois tout à craindre,
Et dans ce qu’à mes yeux le crime offre d’horreur,
Tout l’effort de mes soins se doit à l’Empereur.
Montrez-moi promptement la main qui l’assassine,
Parlez, est-ce un effet de l’amour de Licine ?
Il murmure, il s’emporte, et dans son désespoir…

sévère.

Non, Madame, Licine est ferme en son devoir,
Il ignore le crime, et loin qu’il l’autorise,
C’est de lui seul qu’on craint obstacle à l’entreprise,
Il est Chef de la Garde, et peut tout au Palais,
Et comme on en prévoit de dangereux effets,
Ceux qu’à les prévenir la trahison engage,
Pour le rendre suspect, vont tout mettre en usage.