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Sous un indigne joug Constantin me fait vivre,
Aux plus cruels ennuis sa lâcheté te livre,
Sur tous deux sa rigueur aime à se découvrir,
Je suis las d’être esclave, es-tu las de souffrir ?

sévère.

Seigneur.

maximian.

Explique-toi sans que rien ne retienne,
Ton choix seul peut résoudre ou sa perte ou la mienne.
Et dans ce que m’inspire une juste fureur,
C’est à toi d’ordonner des jours d’un Empereur.
Dans l’ardeur du repos où sans cesse j’aspire,
Il m’est dur de songer à reprendre l’Empire,
Mais j’ai le cœur trop haut pour oser me trahir
Jusques à me soumettre à l’affront d’obéir.
Ma Fille étoit à toi, je t’en donnai parole,
Le lâche Constantin malgré moi te la vole,
Sa tyrannie est prête à lui coûter le jour,
J’ai consulté mon cœur, consulte ton amour.

sévère.

L’écouter fut un crime…

maximian.

Et quoi, tu t’embarrasses ?
Les crimes ne sont faits que pour les âmes basses,
Qui de leur fermeté s’osent trop défier,
Pour se croire en pouvoir de les justifier.
Sur ce scrupule en vain tu trembles à résoudre,
Il n’est rien de honteux pour qui s’en peut absoudre,
Et quoi qu’on puisse oser, c’est aux foibles esprits
À rougir d’un forfait dont le Trône est le prix.
Non que les mouvements que je te fais paroître
Demandent que ton bras s’arme contre ton Maître ;
Pour te laisser ta gloire, et contenter tes vœux,
Le secret de ta part est tout ce que je veux.
Je feindrai comme toi d’ignorer l’entreprise,
Et pourvu qu’en effet ton aveu l’autorise,
Me laissant sans obstacle agir dans le Palais,
Je n’en vois guère à craindre au dessein que je fais.