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Scène III.

D. FERNAND, GUZMAN.
GUZMAN.

Qui l’en croira, Monsieur, votre fortune est faite ;
Esprit, naissance, bien, attraits, le choix est doux.

D. FERNAND.

Me voici cependant avec deux rendez-vous.
Isabelle tantôt m’attend à la même heure.

GUZMAN.

Des deux occasions choisissez la meilleure,
Allez où votre cœur est le plus attaché.

D. FERNAND.

Pour la dame inconnue il se sent plus touché ;
Mais de peur de surprise, ignorant sa naissance,
Autant que je le puis je le tiens en balance ;
Et comme je ne sai ce qui peut arriver,
Si celle-ci manquoit, l’autre est à conserver.

GUZMAN.

Mais, puisqu’elle vous tient ses affaires secrettes,
Lui deviez-vous sitôt découvrir qui vous étes ?
Sa suivante a d’abord fait ouïr votre nom.

D. FERNAND.

Qu’il soit connu de tous, qu’en devinera-t-on ?
Il est mille Fernands dans une même ville.
Suffit que j’ai caché que je suis de Séville,
Et qu’enfin me disant de Grenade, j’ai pris
Le surnom d’Avalos pour celui de Solis.

GUZMAN.

Par ce nom trop tôt dit, autre embarras à craindre.
Vous aimez Isabelle, ou du moins l’osez feindre ;
Et si cette Inconnue apprend, quelque beau jour,
Qu’un Fernand Grenadin fasse en deux lieux sa cour ?