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Redoutant mes conseils, ce fils, l’ingrat Maxence,
Par mon éloignement affermit sa puissance ;
On me bannit de Rome, et tel est mon destin,
Qu’il me faut rechercher l’appui de Constantin.
Contre sa tyrannie il m’offre un sûr asile,
Et quand auprès de lui je me crois tout facile,
Loin d’obtenir pour toi l’aveu de ton amour,
J’apprends quel intérêt t’éloigne de sa Cour.
Devenu ton rival, il veut que ton absence
Laisse dans ses projets agir sa violence,
Et tout ce qu’à ton feu l’honneur me fait devoir
Est forcé de céder à son lâche pouvoir.
Ainsi plus le Tyran que l’Époux de ma Fille,
Il usurpe mes droits jusque sur ma Famille,
Et mes vœux par contrainte à ses ordres soumis
Sont l’effet du repos que je m’étois promis.

sévère.

C’est trop, Seigneur, c’est trop, tant de bonté m’accable.
Le Destin a rendu ma perte irréparable ;
Mais l’intérêt de Fauste étant à préférer,
Quand il la met au Trône, en dois-je murmurer ?
Non, il lui fait justice, et pourvu qu’on s’oppose
À l’hymen où pour moi l’Empereur se dispose,
Qu’on ne me force point à l’éclatant refus…

maximian.

Et si je te disois que je veux faire plus ?
J’ai besoin seulement de trouver dans Sévère
Cette fermeté d’âme aux Héros ordinaire ;
Elle aide à repousser le sort le plus affreux,
Et si tu l’as enfin, tu n’es plus malheureux.

sévère.

Ah, seigneur, pour guérir le mal qui me possède,
La grandeur de courage est un foible remède ;
Contre un si rude assaut il n’est point de vertu,
Et qui sait bien aimer…

maximian.

Mais enfin aimes-tu ?